L'Horeca à Bruxelles : Crise ou Renouveau ?

Bruxelles, une ville partagée entre bourgeoisie périphérique en quête d'accessibilité, et locaux en quête d'apaisement. Et les Horeca dans tout ça, sont-ils en crise comme on le lit partout ? Ou plutôt en plein boom ? Plus d'infos ci-dessous...

Date de l'article: 18 Juin 2024

Une mélancolie printanière

Bruxelles. Printemps 2024. Une pluie persistante et battante claque sur le pavé de la capitale, une métaphore parfaite décrivant l'humeur des professionnels de l'Horeca. Les médias en rajoutent une trombe, relatant à qui veut l’entendre les déboires de ces travailleurs passionnés tout autant qu’exténués, et surtout ignorés par des politiciens déconnectés de la réalité. Ainsi se dessine l'image de l'Horeca bruxellois : une ville empreinte de mélancolie et une incertitude quotidienne à laquelle il est difficile de s’habituer, bien que les récentes élections et la percée bleue-turquoise offrent une lueur d'espoir aux développeurs de tous poils vivant de l’économie réelle.

Mal-aimé, l’Horeca ?

Ces dernières années, l'Horeca a été malmené et torturé, considéré comme un secteur en déclin voire indigne de confiance, tant comme interlocuteur que comme secteur finançable. Bien que souvent célébré pour la noblesse des actes qu’il encadre et le travail acharné auquel il astreint, il est en réalité peu valorisé, recevant un soutien financier limité et des crédits à peine suffisants de la part de banques sceptiques.

La passion avant tout

Virage à 180 degrés et changement d’angle de vue. Pour ceux qui vivent cette profession au quotidien, l'Horeca est une passion dévorante et enivrante qui occupe la totalité de leur temps. Le travail est exigeant, mais les récompenses sont immédiates : les sourires des clients, la fidélité, et parfois l'expansion avec de nouvelles succursales pour les concepts à succès. Et cette passion, retransmise via médias interposés, se transmet chaque jour un peu plus à une jeunesse en quête de sens et de challenges, se lançant chaque semaine par dizaines dans des aventures culinaires audacieuses, insufflant une énergie nouvelle à la scène food / beverage bruxelloise. L’Horeca est devenu cool, et représente bien plus que ce métier que beaucoup faisaient autrefois faute de savoir faire autre chose (en caricaturant un chouïa, bien sûr) ! autant s’en réjouir. La nouvelle génération est en marche, et rien ne semble l’arrêter, pas même une crise passagère.

Un nouveau souffle (loin d’être court)

Ce renouveau apporte une vague de fraîcheur à Bruxelles et aux bruxellois, quoiqu’une petite canicule ne leur ferait pas de tort, la rapprochant chaque jour un peu plus de la branchitude de Paris, sa cousine. Jour après jour, nouveaux concepts et idées innovantes émergent du néant et de l’esprit créatif de jeunes portés par la grâce de ce métier, voyant la crise comme une opportunité plutôt qu’un obstacle. Ils sont motivés par l'enthousiasme et l'innovation, même si, en cours de route, ils devront se confronter à la difficile réalité du terrain, tandis que d'autres continueront à faire évoluer le secteur.

Mais qui sont-ils ?

Cette nouvelle génération d'entrepreneurs se divise en deux catégories : les « financiers », souvent issus de formations supérieures, introduisant des modèles mettant la rentabilité au-devant de la scène autant que des pratiques transparentes, fort bienvenues dans ce monde autrefois profondément truqué. Il y a aussi les « passionnés », ces amoureux-transi des produits et des techniques, qui apportent ce petit « je-ne-sais-quoi » d’excitant et novateur à la scène food bruxelloise. Les premiers ont profondément transformé le secteur en le rendant politiquement correct, tandis que les seconds font littéralement pétiller l’Horeca bruxellois en le rendant bigrement sexy et attrayant. Tout bénéfice !

Approche innovante

Sans les ressources financières de leurs aînés, la nouvelle génération doit miser sur la créativité, pas d’autre solution de toute façon. Ils investissent des quartiers secondaires où le ticket d’entrée autant que les loyers sont sensiblement moins chers. Ces quartiers sont authentiques, ont quelque chose de très « bruxellois », mais ne font pas partie des quartiers traditionnellement recherchés. En fréquentant ces néo-établissements, on redécouvre aussi Bruxelles. Les exemples pullulent d’établissements fraîchement installés dans des quartiers où, il y a 10 ans, personne n’aurait misé un kopek. Kosto sur le quai des Péniches, Tuck Shop dans le bas de Saint-Gilles côté Gare du Midi ou encore Barge sur le Boulevard d’Ypres. Des exemples concrets, tous styles confondus, illustrant ce phénomène.

Les restaurants traditionnels

Alors que Bruxelles mute, se développe, change les codes de circulation, apaise et irrite en même temps, les boomers et génération X regrettent l'accessibilité d'antan, préférant le confort de la périphérie où les établissements Horeca demeurent d’un classicisme désuet mais néanmoins réconfortant. La nostalgie n'est cependant pas toujours justifiée. La ville change, et cela demande du temps et de l’adaptation. Plutôt que de craindre le changement, il est temps d'embrasser l'enthousiasme qui suinte de ces centaines de micro-projets ultra qualitatifs.

Conclusion

Est-ce l'Horeca qui façonne Bruxelles ou l'inverse ? La question reste ouverte, mais une chose est sûre : malgré les crises successives, le secteur demeure résilient et stoïque, animé par la passion et l'innovation de ses membres. Il continuera à se réinventer quels que soient les obstacles qui obstrueront son parcours. Longue vie à l'Horeca !

 

Par Grégory SORGELOOSE 16-06-2024 / Crédit photo : Grégory SORGELOOSE